Musée Pouchkine. Cinq cents ans de dessins de maîtres du 2 février au 12 mai 2019, Fondation Custodia, Paris

La Fondation Custodia propose une exposition exceptionnelle autour des chefs-d'œuvre de la collection des dessins du Musée Pouchkine. Cette première grande rétrospective des œuvres graphiques du musée moscovite en France couvre les écoles européennes et russes, du XVe au XXe siècle. À travers une sélection de plus de 200 œuvres, le public va pouvoir saisir la richesse de cette remarquable collection. Dürer, Véronèse, Rubens, Fragonard, Tiepolo, Caspar David Friedrich, Kandinsky, Picasso, Matisse, Modigliani, Chagall ou encore Malevitch sont mis à l'honneur aux côtés de grands noms de l'impressionnisme et du postimpressionnisme : Renoir, Degas, Toulouse-Lautrec et Van Gogh.

 


Albrecht Dürer (Nuremberg 1471 - 1528 Nuremberg)

Putti danseurs et musiciens, avec un trophée antique, 1495

Plume et encre noire, 271 x 314 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

 

Renaissances allemande et italienne

Les visiteurs seront plongés dans ce panorama historique de l'art du dessin en Europe avec les feuilles allemandes de l'extrême fin du Moyen-Âge - représentée par une Tête de Sibylle tracée à la plume par un artiste anonyme du Haut-Rhin - et de la Renaissance. Dessinés en 1495 lors du premier voyage du jeune artiste en Italie, les Putti danseurs et musiciens, avec un trophée antique d'Albrecht Dürer est l'œuvre la plus prestigieuse de cet ensemble.

 

Poussin, Rembrandt et Rubens, le XVIIe siècle

 

Parmi les dessins français du XVIIe siècle sont présentées trois feuilles de Nicolas Poussin, dont l'étude magistrale pour Zénobie trouvée sur les bords de l'Araxe (vers 1640) témoigne de la sensibilité de ce haut représentant de l'art classique pour les idées du néo-stoïcisme.

 

Nicolas Poussin (Les Andelys 1594 - 1655 Rome)

Zénobie trouvée sur les bords de l'Araxe, vers 1640

Plume et encre brune, lavis brun, traces de pierre noire,

146 x 205 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

 

Mais la section consacrée au XVIIe siècle de cette exposition est largement dominée par les dessins hollandais du Siècle d'or, parmi lesquels des paysages de Jan van Goyen, Allaert van Everdingen, Nicolaes Berchem, ainsi que des études de figures.

 

Rembrandt Harmensz. van Rijn (Leyde 1606 -1669 Amsterdam)

Étude d'une femme tenant un enfant dans les bras, vers 1640

Plume et encre brune, rehauts de blanc, 110 x 67 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

 

 

Les dessins de Rembrandt étaient souvent des notations faites sur le vif, lors de ses promenades. L'Étude d'une femme tenant un enfant dans les bras (vers 1650) est un bel exemple de ces rapides croquis à la plume, dans lesquels il préserve la pureté d'une impression, tout en parvenant à traduire la tendre relation émotionnelle entre une mère et son enfant. Ce dessin fut légué au Musée Roumiantsev par le collectionneur Nicolaï S. Mosolov, puis transféré au Musée Pouchkine en 1924.

 

 

Peter Paul Rubens (Siegen 1577 - 1640 Anvers)

Centaure vaincu par l'Amour, 1605-1608

Pierre noire, 463 x 397 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

 

Plusieurs dessins de Rubens feront le voyage de Moscou à Paris, et plus particulièrement le Centaure vaincu par l'Amour. Cette grande feuille est une étude faite d'après un marbre du IIe siècle avant J.-C. Aujourd'hui au Louvre, cette sculpture fut découverte durant le séjour de Rubens à Rome, puis exposée dans le palais du protecteur de l'artiste, le cardinal Scipion Borghèse.

Ce dessin du Musée Pouchkine est une des premières représentations de ce groupe. Il le montre dans son état d'origine, avant les restaurations opérées en 1608. Dans les œuvres de Rubens, la statuaire antique, dépourvue de toute raideur, semble animée de vie.  

 

Le Siècle des Lumières

Représentatif du goût galant de ce temps, un dessin d'Antoine Watteau introduit l'art français du XVIIIe siècle. Il trouve une réponse dans la pose gracieuse et relâchée de la Jeune femme endormie de François Boucher (vers 1758-1760). La facture soignée de cette académie en fait une œuvre achevée et autonome qui, au même titre que les tableaux, pouvait être présentée au Salon, rejoindre les collections des amateurs, ou être reproduite en gravure.

 

Jean-Honoré Fragonard (Grasse 1732 - 1806 Paris)

L'Attaque, fin des années 1770

Encre brune à la pointe du pinceau et lavis brun sur un tracé à la pierre noire, 343 x 460 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

 

Dans le vaste corpus graphique de Fragonard, L'Attaque est l'un des dessins les plus prodigieux. Le cadrage resserré et le mouvement fougueux du pinceau dans la pose du lavis confèrent à cet affrontement une intensité et une grande force plastique.

Le même sentiment de monumentalité se dégage de l'Étude pour la figure d'Hersilie, un dessin de Jacques-Louis David préparatoire au personnage central du célèbre tableau des Sabines conservé au Louvre.

 

Le Romantisme allemand

 

Caspar David Friedrich est sans doute le plus haut représentant du romantisme allemand. Son dessin de Deux hommes au bord de la mer  appartient aux œuvres tardives de l'artiste. Gravement malade, celui-ci ne pouvait plus peindre à l'huile. Le thème des personnages vus de dos, faisant face à un paysage est fréquent dans l'œuvre de Friedrich.

Son caractère contemplatif est caractéristique de l'art romantique. Friedrich jouissait de son vivant d'une grande notoriété en Russie. Lorsque sa gloire commença à s'estomper en Allemagne dans les années 1820, ses mécènes russes, amateurs ou membres de la cour, devinrent son seul appui. Cette renommée justifie la grande présence de ses œuvres dans les collections russes.

La représentation d'un artiste dans son atelier, avec une fenêtre ouverte sur les environs constituait également un sujet récurrent du romantisme allemand. L'aquarelle du Peintre Johann Christoph Erhard dans son atelier  par Johann Adam Klein possède un pendant exécuté par Erhard et dans lequel Klein est figuré assis à son chevalet dans la même pièce, témoignant de l'amitié entre les deux artistes.

 

Vincent van Gogh

 

Après Ingres, Corot et Delacroix, le XIXe siècle se poursuit avec les œuvres de Renoir, Toulouse-Lautrec, Degas - dont l'étude d'une jeune femme à la toilette, Après le bain (fig. 17), offre un écho plastique au Nu féminin de Maurice Denis -, mais aussi avec Gustave Moreau et Odilon Redon.

 

Vincent van Gogh (Groot Zundert 1853 -

1890 Auvers-sur-Oise)

Portrait d'une jeune femme (La Mousmé), 1888

Plume métallique, plume de roseau et encre noire,

sur un tracé au graphite, 325 x 245 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

 

Seul dessin de Van Gogh conservé dans les collections publiques russes, le Portrait d'une jeune femme est lié à La Mousmé, toile peinte en juillet 1888 et conservée à Washington. Reproduisant le tableau, dont les couleurs sont décrites en marge, le dessin était sans doute joint à une lettre adressée à son ami Émile Bernard, dans laquelle Van Gogh annonçait avoir achevé le portrait d'une jeune fille de douze ans.

 

Matisse, Picasso, les avant-gardes européennes

 

Le second niveau de l'exposition est consacré aux mouvements des avant-gardes européennes et russes qui s'exprimèrent dans la première moitié du XXe siècle, depuis Matisse et Picasso, jusqu'à Delaunay, passant par Signac, Juan Gris, Fernand Léger (représenté par sept dessins), mais aussi Franz Marc, Paul Klee, Giorgio De Chirico ou Modigliani

 

Henri Matisse (Le Cateau-Cambrésis 1869 - 1954 Nice)

Portrait de Lydia Delectorskaya, 1945

Fusain et estompe, 527 x 405 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

© Succession H. Matisse

 

Le Musée Pouchkine conserve un fonds important de dessins de Matisse. La plupart de ces œuvres furent données par Lydia Delectorskaya, secrétaire, amie et collaboratrice de Matisse. Son Portrait est l'un des chefs-d'œuvre de l'exposition (don de l'artiste lui-même au Musée national d'Art moderne occidental de Moscou, puis transféré au Musée Pouchkine). Effaçant et travaillant sans cesse son motif, Matisse s'éloigna peu à peu de l'aspect descriptif initial pour atteindre un dessin aux lignes solides et pures. Malgré la simplification du trait, l'image respecte le caractère et la singularité du modèle.

 

Henri Matisse (Le Cateau-Cambrésis 1869 -1954 Nice)

Danse (Composition no I), 1909

Plume et encre noire, aquarelle, 221 x 320 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

© Succession H. Matisse

 

Si le dessin de La Danse nous paraît si familier, c'est qu'il est lié au célèbre tableau homonyme de Matisse conservé au MoMA de New York. Découvrant cette œuvre en février 1909 à Paris, le fameux collectionneur russe Sergueï Chtchoukine souhaita obtenir un panneau similaire pour orner le grand escalier de son hôtel particulier à Moscou (œuvre aujourd'hui conservée à l'Ermitage de Saint-Pétersbourg). Ce dessin lui fut envoyé par Matisse comme l'illustration d'un programme qu'il comptait réaliser.

 

Non loin des œuvres de Matisse, un cabinet sera consacré dans l'exposition aux six feuilles de Picasso provenant de la collection moscovite. L'étude préparatoire pour la Composition à la tête de mort (1908 ; fig. 21), rassemble les éléments traditionnels des vanités, opposant les attributs des plaisirs (les livres, la palette et le miroir) au crâne qui rappelle l'inéluctabilité de la mort. Les couleurs soutenues, le rythme des objets décomposés et insérés dans un espace abstrait sont caractéristiques de l'esthétique cubiste, dont Picasso fut le grand interprète.

 

Pablo Picasso (Malaga 1881 - 1973 Mougins)

Étude pour la Composition à la tête de mort, 1908

Gouache et aquarelle sur un tracé au graphite, 323 x 249 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

© Succession Picasso 2019

 

 

Malevitch, Tatline et Kandinsky, les avant-gardes russes

Aux côtés de leurs confrères européens, les artistes russes sont pleinement représentés dans l'exposition de la Fondation Custodia. Si certains d'entre eux eurent une grande renommée en Occident de leur vivant - Chagall, Kandinsky, Tatline ou Malevitch -, d'autres constituent une véritable découverte pour le public.

Les Enfants dans un pré est l'une des rares œuvres de la période fauve de Malevitch, plus connu pour sa participation au suprématisme.

 

Kasimir Malevitch (Kiev 1878 - 1935 Léningrad)

Enfants dans un pré, 1908

Graphite et gouache, 190 x 177 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

 

La Composition E  de Vassily Kandinsky illustre parfaitement les recherches de l'artiste au début des années 1910. Fasciné par l'art synthétique, il explora l'interaction entre la peinture et la musique, faisant le parallèle entre la couleur et le son, la ligne et le rythme. Ainsi, il associait le bleu indigo au violoncelle et le bleu foncé à la contrebasse, les diverses nuances de vert aux tons du violon, le jaune au tuba et le rouge aux fanfares. Vue sous cet angle, cette aquarelle est une véritable symphonie chromatique.

 

Vassily Kandinsky (Moscou 1866 - 1944 Neuilly-sur-Seine)

Composition E, vers 1915

Plume et encre noire, lavis gris, aquarelle, 227 x 340 mm

Musée d'État des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou

 

Peintre et illustrateur, Alexandre Deïneka joua un rôle majeur dans le développement de l'art soviétique dans les années 1920. Dans ses œuvres, il abordait les thèmes de la jeunesse, du travail, de l'épopée révolutionnaire et de la guerre. Schématique, avec une lointaine inspiration du cubisme, le dessin de grand format, 1er mai est une réplique autographe d'une illustration destinée à un livre pour enfants d'Agnia Barto sur les célébrations de la fête du travail à Moscou.

 

L'exposition de la Fondation Custodia se déroule sur deux niveaux de l'hôtel Lévis-Mirepoix, le premier étage étant consacré aux dessins anciens du XVe au XIXe siècle, tandis que les salons du bas accueilleront les œuvres modernes du XXe siècle. 

Ger Luijten, directeur de la Fondation Custodia, poursuit ainsi sa volonté de proposer au public des œuvres rarement exposées en France : " Les dessins du Musée Pouchkine sont mondialement connus mais n'ont, pour certains, jamais été montrés en Europe, et je suis heureux d'accueillir ces trésors. "

Comme un écho, pour Marina Lochak, directrice du Musée Pouchkine, mue par le désir de diffuser les dessins du musée russe, " le choix de la Fondation Custodia à Paris sembla une évidence ". Elle considère " comme un rare privilège, la possibilité qui nous est offerte de présenter notre collection dans ses murs ".

 

Le Cabinet des Arts graphiques du Musée Pouchkine à Moscou

Le Musée Pouchkine fut inauguré au début du XXe siècle. Ses collections furent fondées par le professeur Ivan Tsvetaev dès 1912, puis enrichies tout au long du siècle. Sa collection d'art graphique, qui comporte aujourd'hui plus de 350 000 gravures et 27 000 dessins, fut également construite grâce aux donations de collectionneurs privés russes, aux acquisitions et aux transferts d'œuvres, notamment depuis le Musée Roumiantsev, l'Ermitage, le Musée Russe et le Musée national d'Art moderne occidental.

 

Fondation Custodia

121 rue de Lille

75007 Paris

01 47 05 45 19

www.fondationcustodia.fr

Créé le : 03/01/2019 - Mise à jour : 05/01/2019
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