Deux expositions à ne pas rater

Si vous ne devez voir que deux expositions cet été, celles la vont vous enchanter :

A Paris, : "Le Douanier Rousseau, l'innocence archaïque" (au Musée d' Orsay jusqu'au 17 juillet 2016) et à Moulins : "Barockissimo" (au Centre National du Costume de Scène jusqu'au 18 septembre).  L'occasion de découvrir  de près d'extraordinaires talents.

 

Visite avec Marianne Lohse

 

 

 

A Paris, Musée d' Orsay: Le Douanier Rousseau, l'innocence archaïque (jusqu'au 17 juillet 2016)

C'est l'exposition-événement de l'année. Si vous ne l'avez pas encore vue, courrez y!  Mettant l'accent sur la singularité,  l'originalité absolue de Henri Rousseau, elle offre, non pas une rétrospective mais un ambitieux parcours  comparatif. Comment ce faux naïf, longtemps moqué  est-il devenu sur ses vieux jours la coqueluche  des poètes, écrivains et peintres avant-gardistes? Quarante trois toiles du Douanier pour lesquelles Orsay a obtenu des prêts exceptionnels dont "Le Rêve" (New York, MoMa) sont  confrontées à quelques unes de ses sources d'inspiration, œuvres d'Uccello, Ingres ou  Bouguereau. Elles dialoguent avec celles de Picasso, Delaunay ou  Kandinsky  qui  pressentirent en lui  "le père de la modernité".

 

La Carriole

 

Toute une génération de surréalistes  s'appropriera cette  vision d'un monde primitif, cette nostalgie d'un paradis perdu. Autodidacte, Rousseau s'est essayé à tous les genres : portraits, natures mortes, allégories patriotiques, paysages de banlieue, jungles sublimes et terrifiantes.

Né à Laval, en Mayenne, le 21 mai 1844, issu d'une famille modeste, il n'est pas douanier mais employé à l'octroi, en faction au pont Saint Nicolas. Copiste au Louvre, il expose avec le groupe des Indépendants.  Pour beaucoup, il n'est  qu'un peintre du dimanche. A la fois candide et rusé, d'une moralité douteuse (il a été condamné pour vol puis pour escroquerie et porte des palmes académiques auxquelles il n'a pas droit), le "gabelou"  piétine jusqu'en 1907. Sa carrière prend alors un tournant décisif avec la rencontre d'Apollinaire  qui  le présente à Picasso. Le peintre espagnol donnera, dans son atelier du Bateau-Lavoir, en l'honneur de son aîné, un banquet mémorable. Affranchi des règles de la perspective, de la réalité anatomique, des proportions, Rousseau fait de son apparente maladresse la caractéristique essentielle de son art.

 

Le rêve

 

La dernière salle, hommage aux célèbrissimes tableaux de jungles, d'un chromatisme éclatant, renvoie à un univers luxuriant, onirique, hanté de prédateurs et de créatures étranges. "Le Rêve" présenté par Rousseau  au Salon des Indépendants, en 1910, peu avant sa mort, inspirera Paul Delvaux et Max Ernst. "Je ne suis pas loin de croire" écrivit Breton  "que dans  cette grande toile" toute la poésie et toutes les gestations mystérieuses de notre temps sont incluses".

Musée d'Orsay, 1 rue de La légion d'Honneur 75007 Paris.

http://www.musee-orsay.fr

 

A Moulins, au Centre National du Costume de Scène, "Barockissimo" (jusqu'au 18 septembre).

Avec  cette exposition,  le Centre National du Costume de Scène célèbre, en beauté, son dixième anniversaire. Superbe voyage dans l'art lyrique, l'exposition retrace, en 150 costumes portés lors des spectacles des Arts Florissants, une aventure qui  court depuis trois décennies, d'opéra en festival, témoignant depuis le succès, historique, d' "Atys", en 1987, à l'Opéra-Comique de Paris, du formidable renouveau de la musique baroque.  

 

Atys de Lully costumes de Patrice Cauchetier rôles de Flore et du Temps

 

 

A l'origine de cet engouement pour un répertoire des XVIIe et XVIIIe siècles tombé dans l'oubli, un Américain passionné, claveciniste et chef d'orchestre, William Christie. "Les Arts Florissants, c'est trente ans de redécouverte  à partir de vieux manuscrits et livrets parfois incomplets. Ce que nous montrons témoigne  de l'incroyable inventivité de cet ensemble, celle d'un baroque toujours plus baroque " observe la musicologue Catherine Massip, commissaire de l'exposition avec Martine Kahane qui fut de 20O6 à 2011, la directrice du CNCS.

 

Vénus © Florent Giffard

 

Des costumes mais aussi des reproductions de maquettes de décors, des photographies, des extraits de films et le tout en musique ! Le regard  est très contemporain. Monteverdi, Purcell, Lully, Charpentier, Rameau : l'art lyrique a ses chefs d'œuvre et ses monstres sacrés. De salle en salle, on est ébloui par  la stupéfiante beauté des costumes. "Tous racontent une histoire" souligne Martine Kahane. Pour "Atys", de Lully, Patrice Cauchetier mêle velours lamé, tulle, rubans et dentelles plissées. Pour "Hippolyte et Aricie" de Rameau le même costumier  habille le trio des Parques d'une robe unique de trois mètres de long en taffetas violine ornée de broderies et de franges argentées. Pour "Teodora" de Haendel, Alison Chitty  fait porter aux soldats de Dioclétien des uniformes très actuels.

 

Les Parques © Florent Giffard

 

Dans le "Platée " de Rameau, Jupiter a les traits de Karl  Lagerfeld  et son habit, signé Gidéon Davy. L'exposition s'achève  avec une évocation joyeuse, déjantée, véritable délire de couleurs  des " Indes Galantes", l'opéra- ballet de Rameau dont les "entrées"  ou étapes n'ont aucun lien entre elles, passant des Turcs généreux aux Incas du Pérou puis au royaume des Fleurs  et enfin  chez les bons Sauvages.

 

Huascar © Florent Giffard

 

Pour cette production de l'Opéra de Paris(1999), William Christie était à la baguette et Marina Draghici habillait danseurs et chanteurs. Un final époustouflant.


Marianne Lohse.

Centre National du Costume de Scène, Quartier Villars  03000 Moulins  www.cncs.fr

Créé le : 30/05/2016 - Mise à jour : 07/06/2016
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